lundi 7 septembre 2009

Livre “Immigrés de force, les travailleurs indochinois en France 1939-1952”

Préface de Gilles Manceron du livre de Pierre Daum.

Ce livre est le premier à aborder aussi directement cette page d’histoire largement occultée. Une occultation emblématique de celle qui recouvre globalement de nombreux épisodes constitutifs du phénomène colonial. Contrairement à ce que cherchait à imposer la loi du 23 février 2005 qui voulait inciter à montrer les « aspects positifs de la colonisation », le travail des historiens tend à lever progressivement ces occultations et à mettre en lumière l’inégalité fondamentale au cœur du fait colonial. Il montre comment cette période de notre histoire a été marquée par de nombreuses atteintes aux principes d’égalité et de fraternité qui étaient alors proclamés par nos institutions mais ne s’appliquaient pas aux indigènes des colonies. L’enquête de Pierre Daum, travail de journaliste scrupuleux dans ses méthodes, participe au mouvement nécessaire d’étude de ce passé. Un mouvement qui se heurte à tous ceux qui veulent éviter la réflexion indispensable sur cet aspect sombre de notre histoire et estiment que le voile pudique de l’oubli a été déjà bien trop levé. « Assez de repentance ! », entend-on ici ou là. Ces cris ne visent en vérité qu’à entraver le travail scientifique qui établit la réalité de l’exploitation coloniale et fait apparaître à quel point elle était éloignée des mythes propagés hier sur les « bienfaits de la colonisation », qui restent encore largement présents aujourd’hui dans l’esprit de nos contemporains. A ces cris mal intentionnés, les chercheurs répondent qu’il ne s’agit pas de « repentance », mais de la reconnaissance des réalités historiques.

Cet ouvrage y contribue. Il a en outre le mérite de le faire en laissant apparaître la complexité du phénomène colonial. Les sociétés qui ont été colonisées n’étaient pas de longs fleuves tranquilles, mais des espaces de conflits et d’inégalités plus ou moins violentes. Le recrutement forcé de ces travailleurs découlait aussi des pressions de l’administration impériale et de l’autorité confucianiste dans les familles. Ces 20 000 hommes étaient loin de former un ensemble socialement homogène. Le livre montre que l’état d’esprit des paysans illettrés enrôlés de force n’était pas celui de la petite minorité de diplômés, souvent volontaires, dont l’avenir était parfois autant bouché par le statut colonial que par la misère et le sous-développement intrinsèque à leur pays, et qui étaient recrutés, quant à eux, comme surveillants ou interprètes.

Il aborde aussi l’une des raisons de l’occultation de leur histoire qui renvoie, non pas au fait colonial, mais à l’idéologie communiste officielle qui est devenue dominante dans le mouvement anticolonial comme dans le régime du Viêtnam indépendant. En effet, probablement parce que ces travailleurs ont eu, à la Libération de la France, le sentiment d’être fort peu défendus par les communistes français, des groupes trotskystes se sont retrouvés influents en leur sein. Le texte d’un tract diffusé par la Délégation générale des Indochinois de France dans la manifestation du 1er mai 1945, qui s’adressait directement aux syndicats et partis de gauche français pour leur demander davantage de solidarité, semble confirmer l’hypothèse d’un sentiment d’abandon de la part de ces travailleurs, notamment vis-à-vis du PCF. C’est alors que ce parti participait au gouvernement qu’un décret paru au Journal officieldu 19 octobre 1945 a dissous la Délégation générale des Indochinois de France. Tout cela peut expliquer l’influence des groupes trotskystes dans leurs rangs.

D’où une mauvaise réputation dans leur propre pays, d’autant qu’à cette influence trotskyste s’ajoutaient les soupçons résultant de leur longue présence dans le pays colonisateur, autrement dit ... d’une sorte de

« francisation » partielle qui les rendait elle aussi suspects. C’est ainsi qu’aucun article sur ce sujet n’est paru, depuis plus de quarante ans, dans la revue en langue française d’inspiration officielle, Etudes vietnamiennes, ni, d’ailleurs, si on excepte l’ouvrage cité, publié tardivement en 1996, dans aucune autre revue ni chez aucun autre éditeur du Viêtnnam. Les réticences à témoigner et les silences que Pierre Daum a constatés lors de son enquête chez plusieurs hommes interrogés sur place s’expliquent très probablement par ce fait.

En ce qui concerne son enquête en France, il a pris appui sur le travail de mémoire déjà entamé par des descendants des travailleurs vietnamiens installés dans ce pays, enfants de la deuxième génération, pleinement français tout en ayant le souci légitime et indissoluble de connaître leur origine [**]. Une proportion importante de la catégorie des quelque trois cents interprètes et surveillants, titulaires du brevet et parlant plus ou moins bien le français à leur arrivée, souvent volontaires lors du recrutement, s’est certainement retrouvée parmi eux. Mais, vu qu’ils furent environ un millier, plus nombreux encore que ces instruits ont été ceux qui venaient de la catégorie des anciens paysans illettrés recrutés de force qui constituait plus de 95% de l’effectif. On compte même parmi eux un artiste plasticien de renommée internationale, Le Ba Dang. Trouvant dans la société française des espaces de promotion sociale et professionnelle et des richesses culturelles nouvelles, souvent à la suite, aussi, de rencontres avec des femmes françaises, ils ont souhaité s’y insérer pour chercher un meilleur avenir et échapper aux blocages [***] du système colonial. La plupart y sont demeurés, y compris après la fin de la guerre et la réunification du Viêtnam.

Pour ces hommes qui ont voulu rester en France malgré toute l’injustice dont ils y avaient été victimes ou témoins, l’attrait voire l’admiration pour d’autres aspects, qu’ils avaient découverts, de ce dont cette société était aussi, par ailleurs, capable, ont dépassé leur dégoût pour sa politique coloniale. Ils ont senti qu’ils pouvaient être perçus en France comme des égaux, à l’opposé de la situation coloniale où ils restaient des nhà quê (paysans) et des indigènes. Cet attrait et cette admiration ont même surpassé en eux la nostalgie de leur famille et de leur propre patrie. Le paradoxe de cet épisode méconnu de notre histoire coloniale est que , pour certains de ces hommes, l’immigration de force qu’ils ont subie a débouché, après guerre, sur une forme d’émancipation inespérée, au prix d’un consentement à leur exil. La colonisation a été à l’origine de multiples rencontres ; c’est cela aussi, la complexité du fait colonial.

Gilles Manceron


© Éditions Solin – Actes Sud.

Notes

[**] En particulier Joël Pham, fils d’ONS, qui tient le site internet
http://www.travailleurs-indochinois.org/
où il a entamé notamment la publication d’un mémorial recensant le nom et l’histoire de chacun de ces travailleurs. Ainsi que la réalisatrice Dzu Le-Lieu, auteure de Les Hommes des 3 Ky, documentaire de 52 minutes réalisé en 1996, et diffusé sur la chaîne satellitaire Planète.

[***] Liêm-Khê Luguern, « Les Travailleurs indochinois en France, pendant la Second Guere mondiale”, Carnets du Viêt Nam, N° 15, juin 2007, p.23.


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mercredi 2 septembre 2009

Extraits des poèmes de Bác Hồ (Ho Chi Minh)

"La rose s'ouvre et la rose
Se fâne sans savoir ce que rose fait.
Il suffit qu'un rose parfum
S'égare dans une maison d'arrêt
Pour que hurlent au coeur de l'enfermer
Toutes les injustices du monde."

Hoa hong no, hoa hong lai rung,
Hoa tan, hoa no cung vo tinh.
Huong hoa bay thau vao trong nguc,
Ke voi tu nhan noi bat binh.

~~~~~~

Dix heures. La Grande Ours effleure les sommets.
C'est l'automne. Un grillon chante son allégresse.
Qu'importe au prisonnier l'automne et ses ivresses ?
Le seul chant de son coeur : Revoir sa Liberté.

Bac dau muoi gio ngang dinh nui
De keu khoan nhat don mung thu
Than tu dau thiet thu sang chua
Chi nghi hom nao mo cua tu.

~~~~~~


"Je descends vers Yong Ming par la route des eaux
Les pieds pendus au toit, supplicié d'un autre âge
Sur les rives, partout, denses sont les villages
Et légers, les sampans des pêcheurs sur les flots"

Dap thuyen thang xuong huyen Ung Ninh
Lung lang chan treo tua giao hinh
Lang xom ven song dong duc the
huyen cau re song nhe thenth thenth

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"Jusqu'au fleuve jadis vous m'accompagniez
A bientôt, vous disais-je, à la moisson prochaine
De nouveau la charrue a passé sur la plaine
Et moi, loin du pays, je suis un prisonnier"

Ngay di, ban tien den ben song
Hen ban ve khi lua do dong
Nay gat da xong, cay da khap,
Que nguoi, toi van chon lao lung

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"Vaste est la région, mais ingrate la terre
L'homme aime le labeur comme l'économie.
Ce printemps, parait-il, n'a pas reçu de pluie ;
Deux, trois gerbes rentrées sur les dix qu'on espère."

Vung day tuy rong, dat kho can,
Vi tho nhan dan kiem lai can.
Nghe noi xuan nay troi dai han,
Muoi phan, thu hoach chi vai phan

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"Livres neufs, bouquins anciens, grossièrement assemblés...
Couverture de papier vaut mieux que sans couverture,
Dormeurs des beaux lits princiers, à l'abri de la froidure,
Beaucoup d'hommes en prison passent la nuit éveillés !"

Sach xua, sach moi boi them am,
Chan giay con hon chang co chan.
Truong gam , giuong nga, ai co biet,
Trong tu bao ke ngu khong an ?

~~~~~~

L'équilibre au départ rend l'issue incertaine ;
La victoire finit par pencher d'un côté.
Bien préparer tes coups, garde ton plan secret
Et tu mériteras d'être un grand capitaine."

Von truoc hai ben ngang the luc,
Ma sau thang loi mot ben gianh.
Tan cong, phong thu khong so ho,
Dai tuong anh hung moi xung danh.

~~~~~~

"Je suis un homme honnête et mon âme est tranquille.
On me soupçonne d'être un chinois ténébreux !
Le chemin de la vie est toujours dangereux,
Mais vivre sa vie est moins que jamais facile"

Ta nguoi ngay thang, long trong trang
Lai bi tinh nghi la Han gian.
Xu the tu xua khong phai de,
Ma nay, xu the kho khan hon.

**
Veille

Une veille...
une veille...
une troisième veille...
Pas moyen de dormir...
Je me tourne, angoissé...
Quatre, cinquième veille...
est-ce un rêve ?
Est-ce une veille ?
Cinq branches d'une étoile enroulent mes pensées.

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« Sous le choc du pilon souffre le grain de riz
Mais l'épreuve passée, admirez sa blancheur
Pareils sont les humains dans le siècle où l'on vit
Pour être homme, il faut subir le pilon du malheur ».


Excusez-moi pour ne pas avoir mis les accents en vietnamien mais je n'ai pas de pluging, cela serait trop long d'utiliser le clavier viet du net.

Cliquez ICI pour revenir à Bác Hồ - 1890 / 1969
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« Mon ultime souhait est que tout notre Parti, tout notre peuple s’unissent et fassent tous leurs efforts pour édifier un travail pacifique, réunifié, indépendant, démocratique et prospère et contribuent dignement à la révolution mondiale. » - Citation d’Ho Chi Minh.

lundi 18 mai 2009

La nouvelle bataille du général Giap - Suite

L’homme qui a dirigé les forces nord-vietnamiennes contre les États-Unis dans la guerre du Vietnam a écrit deux lettres ouvertes — la dernière le mois dernier — contre les plans gouvernements concernant la bauxite, et sa prise de position parait en avoir inspiré d’autres.

Dans une rare manifestation d’opposition de l’opinion publique dans ce pays dirigé par un parti communiste unique, 135 scientifiques et intellectuels ont signé une pétition qui a été remise au président de l’Assemblée nationale à Hanoi.

Ils ont appelé le gouvernement à stopper le lancement de nouveaux projets de bauxite sur les hauts plateaux du centre jusqu’à ce qu’une enquête d’impact sur l’environnement soit terminée.

Nguyen Tan Dung, le Premier ministre, a présenté l’extraction de la bauxite comme « une grande politique du parti et l’État » et a déclaré que les projets iront de l’avant en même temps que les questions environnementales seront traitées.

Mais selon le professeur Vo Quy, l’un des écologistes les plus en vue dans le pays, les « dommages à l’environnement l’emportent de loin sur les avantages économiques ».

« Je soutiens le développement économique, mais pas les mines de bauxite, » a-t-il dit à Al Jazeera, ajoutant que les hauts plateaux du centre représentent un « espace d’une extraordinaire beauté et riche en potentiel d’éco-tourisme en même temps qu’une zone agricole très productive ».

Craintes des retombées

L’extraction de la bauxite produit des milliers de tonnes de déchets toxiques connues sous le nom de « boues rouges » selon Quy et d’autres experts.

Le jeune mouvement écologiste du Vietnam craint que les résidus toxiques n’empoisonnent les rivières qui se jettent dans des zones densément peuplées, et surtout dans le delta du Mékong au sud, lequel héberge des exploitations piscicoles et certaines des rizières les plus productives du Vietnam.

Dans ses lettres, Giap a demandé à des scientifiques, des économistes et des militants du mouvement social de « proposer au parti et à l’Etat d’avoir une politique saine concernant les projets de bauxite dans la région des hauts plateaux ».

« C’est également mon avis que nous ne devrions pas exploiter la bauxite. L’exploitation aura de graves conséquences sur l’environnement, la société et notre défense nationale », écrit-il.

Le général a aussi cité un rapport de 1980 qui mettait en garde le gouvernement que l’exploitation de bauxite dans la région « entraînerait des effets écologiques dévastateurs et à long terme et non seulement pour les résidents, mais nuirait aussi à la vie et à l’environnement des habitants des plaines au sud des provinces centrales ».

Contrat signé

Malgré la pression exercée par le général Giap, le gouvernement a poursuivi son objectif et a signé un contrat avec une filiale de la société chinoise d’aluminium Chinalco pour une mine de bauxite dans la région des hauts plateaux.

Mais il a organisé un séminaire de deux jours avec des scientifiques à Hanoi, le mois dernier, afin de discuter de la façon de minimiser les dommages provoqués par l’extraction de la bauxite sur l’environnement.

Il a été déclaré à cette occasion que le projet d’extraction de bauxite serait d’une échelle plus réduite, avec des restrictions sur le nombre d’employés chinois.

Les critiques s’étaient plaints que le fait d’avoir des milliers de travailleurs chinois vivant dans la région stratégique des plateaux du centre représentait une inacceptable menace pour la sécurité nationale, étant donné que le Vietnam a une longue histoire de conflits avec son voisin du nord.

L’écrivain vietnamien Nguyen Thien affirme que le projet « est tellement illogique et irrationnel que de nombreuses personnes suspectent qu’il fasse partie d’une entente secrète entre le Vietnam et la Chine, avec des implications stratégiques ».

D’autres encore disent que l’extraction de la bauxite n’est même pas commercialement rentable, car elle exige beaucoup d’eau et d’électricité, ces ressources de base faisant souvent défaut au Vietnam.

Le professeur Dao Cong Tien, ancien président de l’Université d’économie de Ho Chi Minh Ville, explique que l’exploitation minière est de nature à entraîner une pénurie d’eau qui aurait de graves répercussions sur les producteurs agricoles de la région centrale des hauts plateaux.

Nguyen Huu Ninh, prix Nobel pour ses travaux sur le changement climatique, se demande si les projets de bauxite bénéficieront à la nation.

« Il n’y a pas de sens dans un projet qui n’apportera pas d’avantages aux populations locales, » dit-il.

Mais malgré les doutes et les objections, le gouvernement a dit que le projet de la bauxite ira de l’avant.

Pour Giap, le général qui a triomphé dans les guerres menées par la résistance contre les Français et plus tard contre les forces américaines, la bataille pour protéger les forêts et les rivières de la région des hauts plateaux de l’empiétement économique chinois pourrait bien être son combat le plus difficile.

mercredi 18 mars 2009

Monseigneur Cassaigne - Di Linh (Djirin)

Nota : L'ancien nom de Di Linh = Djirin
Avant de commencer cet article, je voudrais vous faire savoir que j'ai eu l'honneur de connaître Monseigneur Jean Cassaigne. J'avais fait ma première communion à la Cathédrale de Saigon et j'ai reçu l'hostie de sa main.

Monseigneur Jean Cassaigne -
Le Père des lépreux

C’est un personnage peu connu des Français, sauf de ceux qui séjournèrent en Indochine. Enfait, cet homme est proche de nous par le temps, puisqu’il mourut en 1973. Il est tout proche par ses qualités de cœur, son humour et son bon sens. Né en 1895 à Grenade dans les Landes, en pays gascon, Jean Cassaigne ressent tout jeune une vocation missionnaire qui est longtemps entravée par son père. Lorsqu’enfin il peut entrer au séminaire, la guerre de 1914-1918 survient, et il s’engage. On lui confie la charge d’infirmier. C’est une dure expérience où il apprend – dans le concret – la confiance totale en Dieu et le service des malades. Une fois démobilisé, il entre au séminaire des Missions étrangères de Paris. Il est ordonné prêtre en 1925, recevant bientôt une affectation à Saigon. Après six mois, maîtrisant assez bien la langue vietnamienne, le Père Cassaigne se rend à Di Linh (Djiring) porté l’Évangile aux Srê et aux Maa, des ethnies à demi sauvages des Hauts-Plateaux du nord-est de Saigon. Il apprend, non sans efforts, la langue kôhô parlée par eux. Il publie le premier dictionnaire kôhô-français-vietnamien et des livres de prières. En peu de temps, il devient le père d’une chrétienté fervente. La rencontre des lépreux – nombreux dans cette région pauvre – donne à son apostolat missionnaire une orientation particulière. Sa charité exemplaire le fait connaître et estimer dans la région entière. Pour les lépreux, il crée un village où il est à la fois, le père et l’infirmier aux mains nues. Ses mérites, connus de tous, expliquent le choix qui est fait de lui, en1941, comme évêque de Saigon. La période est difficile ; elle va devenir tragique à partir de 1945 et durer pour lui jusqu’en fin 1955. Temps de guerre, de bombardements, de divisions, de déchirements, de pleurs, de déracinements... C’est peut-être à ce moment que Mgr Cassaigne montre le mieux la grandeur sans apprêt de sa personnalité toute surnaturelle. Il gagne ou il conserve l’estime générale en se dépensant sans compter. En 1955, il retourne à la léproserie de Di Linh (Djiring) qu’il avait fondée. La lèpre qu’il avait si souvent soignée sur les autres, l’a atteint. Il se donne tout entier à ses « chers enfants lépreux » dans la joie de « les comprendre de l’intérieur ».Après sa mort survenue le 31 octobre1973, ses obsèques furent grandioses. Aujourd’hui, le peuple du Viêt Nam n’a pas oublié sa mémoire, et sa tombe est un lieu de prière très fréquenté. Personne ne doute que sa prière ne soit efficace auprès de Dieu.
Nota : L'ancien nom de Di Linh est Djiring











Aimer, servir, sourire

« Le Père Cassaigne est un vrai missionnaire, un vrai apôtre du Christ et un vrai Français. Il est venu dans la colonie pour aimer les indigènes, pour vivre pour eux et avec eux, pour leur apporter les bienfaits de la religion catholique et de la civilisation française. Il a fait aimer sa religion et sa patrie en se faisant aimer. Il s’est assigné ce devoir de prêtre et de patriote. Et il ne connaît que ce devoir, le remplissant simplement, obscurément, naturellement, sans souci d’autre chose : ses Moïs à évangéliser et à soigner ! Voilà toute sa préoccupation. Je puis parler en connaissance de cause du Père Cassaigne, car j’ai souvent eu l’occasion de l’apprécier, à tel point que sa vue me rappelle cette devise de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, précisément la Patronne des Missionnaires : “Aimer, Servir, Sourire”.C’est ce que fait quotidiennement le nouvel évêque de Saigon. J’ai déjà dit qu’il ne sait qu’aimer et servir son Dieu et ses Moïs. Et comment ? Jusqu’à se faire l’infirmier de ses Moïs, en s’occupant de leurs âmes et de leurs corps. Pour eux, il est le pasteur et le médecin, et ce, avec un continuel sourire. Je l’ai vu, le samedi, préparer des paquets de tabac pour les donner le lendemain après la messe dominicale, à ses ouailles moïs. Moi aussi, j’ai été subjugué par son sourire. Car le Père Cassaigne, c’est la gaieté, la simplicité, la bonté, c’est-à-dire la vraie sainteté. Je prie respectueusement son excellence Mgr l’évêque de Saigon d’excuser mon indiscrétion mais il était bon que ses diocésains se rendissent compte de leur bonheur d’avoir un chef en même temps qu’un Père. Mgr Cassaigne continuera à faire aimer son Dieu et sa Patrie. »

Par Jacques Lê Van Duc, au moment de sa nomination, février 1941 –
Extraits. Prière devant la tombe de Mgr Cassaigne



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Mû par sa charité inlassable, Jean Cassaigne fut à la fois l’apôtre de Jésus, l’ami des petits, le père des lépreux, l’homme de l’unité, une source de paix par la souffrance transformée en joie.
(Par le père Guilmard, moine de Solesmes)
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Je voudrais profiter de cette occasion pour vous citer cet article paru dans le bulletin EDA n° 437 du 16/03/2006
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Le quotidien du Parti communiste vietnamien rend un vibrant hommage à une religieuse catholique qui a consacré sa vie aux lépreux

Une fois n'est pas coutume, l'organe du Parti communiste vietnamien, le Nhân Dân du 28 février a consacré son plus gros titre à une religieuse catholique : "L'histoire émouvante d'une religieuse qui vient de recevoir le titre d'héroïne du travail Le quotidien de Hanoi consacre un long article à la sœur Mai Thi Mâu qui a consacré sa vie aux soins des lépreux à la léproserie de Di Linh, située à une cinquantaine de kilomètres de Dalat. Un tel reportage n'avait encore jamais été publié dans les colonnes de l'organe du Parti. Celui-ci a souvent fait l'éloge de militaires ayant fait le sacrifice de leurs vies pour la patrie, de travailleurs ayant battu des records d'endurance au service de la production. Jamais encore, il n'avait vanté les mérites d'une personne animée par la charité, et surtout d'une religieuse.
Bulletin EDA n° 437 du 16/03/2006
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De même que le fleuve retourne à la mer, le don de l'homme revient vers lui. - Proverbes chinois
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